26 Nov

Un Bicentenaire ? Non ! Une fête de Famille…

A l’occasion du Bicentenaire de la naissance de l’abbé Joseph Hippolyte Join-Lambert, samedi dernier, les anciens élèves de l’Institution étaient rassemblés. La joie des cœurs était inversement proportionnelle à la météo…

 

Dans un premier temps, un moment de recueillement devant le Monument aux Morts, puis trois discours ont été prononcés auprès de la statue de l’abbé Join-Lambert, par M. Bertrand Camillerapp, M. François Vermesse et M. Jean-Dominique Eude. Une plaque, posée sur le socle de la statue, a ensuite été dévoilée par quelques membres de la famille Join-Lambert ; et une gerbe de fleurs a été déposée par deux élèves se prénommant… Hippolyte. Sœur Chantal, Directrice de l’Ecole, Mme Chantal Desbarrières, Directrice du Collège, M. Hervé Morisset, Directeur du Post-Bac, étaient entourés de plusieurs professeurs, parents, membres du personnel et amis de l’Institution.

 

La Messe était présidée par Mgr Descubes, et concélébrée par les Pères du Boullay, Lhermitte, Potel, Prévost, Robin et Simon. L’assistance, nombreuse, aura apprécié la prestation de l’orchestre classique, composé d’élèves et dirigé par Mme Desjardins. Mme de Saint-Germain dirigeait les chants et, comme d’habitude, Jacques Hamel faisait s’exprimer l’orgue de la chapelle. Merci à Mme Eude pour les fleurs, à Mmes Trancart et de Vergnette pour l’organisation générale, aux lecteurs, MM. Fiévet et Dionisi, et aux servants d’autel, Maxence, Naoto, Baptiste et Wandrille.

 

Un déjeuner festif rassembla près d’une centaine de convives, dans une atmosphère digne des grands jours de l’Institution. L’Association des Anciens Elèves s’est ensuite réunie pour l’assemblée générale annuelle.

 

Une belle journée, vraiment. Oui, Monsieur Join-Lambert, l’esprit est toujours là !

 

Voici les trois discours prononcés.

 

De Bertrand CAMILLERAPP, Président de l’Association des Anciens Elèves de Join-Lambert :

 

« Il y a exactement deux cents ans un 23 novembre naissait à Elbeuf, Joseph-Hippolyte Join-Lambert et c’est très probablement pour cette raison que la tradition veut que l’assemblée générale des Anciens Elèves de l’Institution se tienne le dernier samedi de ce mois.

  

J’évoquerai très rapidement l’enfance du jeune Joseph-Hippolyte à Rouen où il fait de brillantes études au Collège Royal (actuellement Lycée Corneille) et par la suite à Paris à l’Ecole Polytechnique d’où il sort très bien classé pour intégrer l’Ecole des Ponts et Chaussées. Finalement en 1936, il décide d’entrer au Séminaire, il est ordonné prêtre en 1840 et revient alors à Rouen. C’est tout d’abord à Bonsecours qu’en 1843, il ouvre un pensionnat, mais finalement c’est à Bois Guillaume qu’il fait édifier plusieurs bâtiments pour effectuer la rentrée scolaire en octobre 1846 avec 37 élèves. Les années qui suivent permettent un développement certain de l’Institution et le nombre d’élèves croit régulièrement.

 

Malgré son énergie débordante, les multiples soucis, qui l’accablent, l’empêchent de ménager sa santé et ne lui permettent pas de voir la pleine réussite de son œuvre. L’abbé Join-Lambert s’éteint très jeune à Bois Guillaume en avril 1857. Toutefois la continuité est assurée et l’Institution perdure et se développe.Très rapidement une Association des Anciens Elèves s’est constituée et quelques années plus tard, elle fait réaliser par le sculpteur Alphonse Guilloux cette magnifique statue en Bronze qui est installée à Bois Guillaume en 1894.

 

Alphonse Guilloux était né le 2 juin 1852 à Rouen, Il avait fait ses études à l’École des Beaux-Arts de Rouen puis à l’École des Beaux-Arts de Paris. Lauréat du concours de l’école des Beaux-Arts à Paris en 1880,il obtient le prix Boucteau de l’Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Rouen en 1882. Chevalier de la Légion d’honneur, il deviendra professeur de sculpture à l’École des Beaux-Arts de Rouen. L’association des Anciens Elèves avait donc porté son choix sur un sculpteur de grand renom pour la réalisation de cette œuvre. L’on peut citer d’autres réalisations d’Alphonse Guilloux dans la région telles que : Enfants de la fontaine Sainte-Marie à Rouen (1879) ; Portrait de Pierre Corneille, marbre, Petit-Couronne, musée départemental Pierre Corneille ; Monument des frères Bérat, square Verdrel, Rouen (1905) ; Buste d’Eugène Noël, pierre, Jardin des plantes de Rouen (1905) ; Décor de la façade du Grand Hôtel de la Poste, rue Jeanne-d’Arc, Rouen.

 

En 1900, l’Institution vient s’installer rue de l’Avalasse. La statue y sera replacée et par chance elle ne subira pas de dommage lors des bombardements de 1942. Peut être l’avait-on protégée avec des sacs de sable, mais je n’ai pas trouvé de traces écrites me permettant de vous dire qu’elle avait été mise à l’abri ailleurs. Comme elle, l’Association des Anciens Elèves a suivi l’évolution générale du monde de l’éducation en accompagnant la communauté éducative dans sa tâche passionnante et difficile, et je suis certain que l’Abbé Join-Lambert était là aussi pour veiller sur toutes les générations qui sont passées dans cette cour.

 

Je suis donc très heureux avec de l’ensemble des Anciens Elèves de pouvoir fêter avec vous tous ce bicentenaire à l’occasion duquel cette statue a été rénovée. Témoin de tous les instants de la vie de l’Institution, elle continuera à témoigner de la difficile tâche que s’était fixée avec la bénédiction de Dieu notre cher Hippolyte et que toute la communauté éducative de l’Institution poursuit aujourd’hui. »

 

De François VERMESSE, Président de l’Organisme de Gestion :

 

« Monseigneur, Mesdames, Messieurs,

 

Je veux tout d’abord excuser Monsieur Pierre ALZON, Président d’honneur, qui regrette vivement de ne pas être présent parmi nous.

 

Depuis le 21 novembre 1843, date de fondation de cette Institution, de très nombreux élèves en ont usé bancs et bureaux. C’est dire aussi quel a été l’investissement des hommes et des femmes de cet établissement au fil des années afin que nous puissions aujourd’hui encore nous rassembler autour de vous, Abbé Join-Lambert. L’Institution du même nom a traversé des périodes, certaines plus difficiles les unes que les autres, mais l’engagement et la volonté de tous ont surpassé les craintes et les doutes. Permettez-moi de revenir sur trois faits qui ont marqué la vie de l’Institution au cours de ces trente dernières années :

 

La création des classes préparatoires dites post –bac rue du champ des oiseaux fut réalisée en 1992. Cette ouverture réalisée à l’initiative de Pierre ALZON fut un réel changement dans la vie de l’Institution et nous ne pouvons que nous féliciter aujourd’hui de la création de ces classes supérieures qui, au-delà des possibilités offertes à nos élèves, ont permis de traverser une période particulièrement difficile. Cette période difficile fut la conséquence de la fermeture de l’école en 1998-1999. L’effectif de l’établissement ne pouvait alors augmenter malgré le total et inconditionnel investissement de l’équipe de direction menée par Alain SYSTERMANS. Nous nous devions de réagir très rapidement.

 

Après une longue réflexion et une réelle concertation, nous avons alors proposé le regroupement de trois établissements privés catholiques de Rouen : l’école Beauvoisine, le collège Bellefonds et l’Institution Join-Lambert. Ce regroupement réalisé en septembre 2009 sous l’égide de Monsieur EUDE, nouveau chef d’établissement, et d’un nouveau conseil d’administration n’a  pas été particulièrement simple et a fait l’objet de critiques dont une a été différemment comprise et appréciée. En cette journée d’assemblée des anciens élèves, il me semble opportun de revenir très brièvement sur les motivations de changement de nom de cette Institution. Comme je le disais à l’instant, nous avons souhaité un regroupement d’établissements et non une fusion – absorption. Nos trois établissements se trouvaient alors dans une situation difficile et notre priorité était et est toujours aujourd’hui de défendre l’enseignement privé catholique à l’image de la route que nous a tracé l’Abbé JOIN-LAMBERT voilà près de 170 ans. Ce regroupement ne devait pas donner priorité à un établissement plutôt qu’à un autre et nous nous devions alors de changer le nom de l’Institution. Les anciens élèves du collège Bellefonds ont vivement regretté la disparition, non seulement du nom de leur établissement, mais aussi des bâtiments qu’ils ont arpentés durant leur scolarité. Je précise que le nom Join-Lambert reste attaché aux classes préparatoires et que la statue du fondateur que nous honorons aujourd’hui est et restera au centre de notre établissement.

 

Nous nous apercevons à quel point aujourd’hui, ce regroupement a été bénéfique et salutaire. Sans la construction des classes préparatoires en 1992 et le regroupement effectué voici trois ans, l’Institution aurait eu le plus grand mal à survivre. Aujourd’hui, fort d’un effectif de 1253 élèves dont 125 internes, nous devons poursuivre notre effort car la route est encore longue.

 

Ancien élève de l’Institution, ancien parent d’élèves, aujourd’hui président d’OGEC de l’Institution, rien n’a changé dans ma volonté de participer activement à  la défense de l’enseignement catholique et au rayonnement de cette Institution. Entouré de personnes qui partagent le même élan, je suis  persuadé que les décisions prises et les choix opérés ont été ceux qui nous permettent aujourd’hui de poursuivre l’action entreprise par Joseph-Hippolyte JOIN-LAMBERT.

 

Merci l’abbé de nous avoir montré une si belle voie et merci à vous tous, chefs d’établissement, enseignants, personnels divers, anciens élèves, administrateurs de l’OGEC et de la Société Anonyme, parents d’élèves, et élèves de nous accompagner dans cette mission qui, malgré les obstacles nombreux, nous procure cette immense  joie d’accompagner les jeunes qui nous sont confiés vers le meilleur avenir que nous pouvons leur souhaiter et qui, ne l’oublions pas, sont les anciens élèves de demain. Merci à vous tous. »

 

De Jean-Dominique EUDE, Directeur de l’Institution :

 

« Cher Abbé,

Mon Cher Hippolyte,

 

Dans un courrier, tu écrivais à un de tes amis : « Je te permets, je te prie même, de toujours me tutoyer ; personne n’en sera scandalisé. »  Je prends aujourd’hui cette licence, ayant la prétention d’être, je l’espère, un de tes amis et, ce n’est pas la moindre des responsabilités ni le moindre des honneurs, un de tes successeurs.

 

Alors, mon Cher Hippolyte, laisse-moi te dire quelques mots. Tout d’abord, j’espère que tu te trouves bien ici. On t’a déplacé plusieurs fois : le parc de Bois-Guillaume et même dans cette cour Saint-Joseph (tu as remarqué qu’on avait donné à cette cour ton premier prénom ?), tu en as connu des changements, des évolutions et des transformations.

 

On t’a déplacé plusieurs fois, disais-je. Cela me rappelle l’Evangile selon saint Jean : « Quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture toi-même pour aller là où tu voulais ; quand tu seras vieux, tu étendras les mains, et c’est un autre qui te mettra ta ceinture, pour t’emmener là où tu ne voudrais pas aller. » Mais, pour tes 200 ans, âge ô combien respectable, j’espère simplement que tu trouves l’endroit sympathique, avec, par exemple, ces élèves de Maternelle qui passent devant toi chaque matin et dont tu admires, sans aucun doute, la fraîcheur et la spontanéité. Je dois aussi te confier que je suis admiratif de ton calme et de ton stoïcisme devant leurs cris et leurs petites bêtises.

 

Ce calme, cette patience, d’où viennent-ils ? Tu en as connu des soucis. Tu en as souffert, de ces mille médiocrités qui t’entouraient. Et pourtant, tu as tenu bon. Tu savais que toute joie a ses racines en forme de croix, et, dépassant la révolte humaine d’un quotidien si lourd à porter, tu as crié au Seigneur : que Ta Volonté soit faite, et non la mienne. Tu as donné ta vie, ta santé, ta fortune, ton rang ; tu as tout donné. Tu t’es appuyé sur le Seigneur, ton unique rocher.

 

Tu peux compter sur nous, sur chacun de nous. Car, au-delà de la lettre, c’est bien l’esprit qui vivifie. « L’esprit voulu par Monsieur Join-Lambert s’est transmis dans la fidélité de génération en génération. » écrivait à juste titre l’abbé Morin ; nous croyons qu’il en est encore de même aujourd’hui. Tu as sans doute remarqué que nous avions une nouvelle devise depuis trois ans : « Choisir la confiance ». Je devrais dire une deuxième devise, car celle que tu as choisie, « Instaurare in Christo », est toujours d’actualité, en particulier pendant cette Année de la Foi. Ces deux devises se complètent bien, tu ne crois pas ? C’est bien parce qu’on s’enracine dans le Christ, source et sommet de toute activité humaine, qu’on peut « choisir la confiance ».

 

Cet esprit est toujours bien vivant. En ce sens, faire mémoire, fêter un bicentenaire, ce n’est pas être tourné vers le passé, aussi glorieux soit-il. C’est avoir conscience qu’en connaissant ce passé, les tribulations qui ont accompagné l’œuvre naissante et qui t’ont tant secoué, on peut faire face à l’avenir, c’est-à-dire aux jeunes, en travaillant ce qui t’a le plus fait souffrir : l’unité ; en proposant ce qui t’a le plus enthousiasmé : le message de liberté et de dignité qu’offre l’Evangile ; en revêtant tout simplement la même tenue que toi : la tenue de service.

 

Que cet esprit que tu as voulu, mon Cher Hippolyte, nous en soyons dignes ! A nous de le transmettre, avec force et douceur, exigence et bienveillance, ardeur et humilité. Et, puisque nous croyons en la Communion des Saints, nous savons que tu nous accompagnes, discrètement mais efficacement, pour que l’Institution soit source de connaissance et d’excellence, source de Paix et de Joie pour tous ceux qui la fréquentent.

 

A bientôt, mon Cher Hippolyte. Puissions-nous, à chaque fois que nous passerons devant toi, te saluer par une motion intérieure, et te dire : toi qui es entré dans la joie du Maître, accompagnes-nous sur les chemins du quotidien. Et un grand merci pour ton don.

 

Tu ne dis rien ? Permets-moi une dernière familiarité en lisant dans tes pensées. Car, dans la commissure de tes lèvres fines et fermées, je vois une réserve et une bonté naturelle. Tu sembles attendre, concentré et un peu soucieux, que nous progressions dans la compréhension des enjeux réels de l’Éducation. Et, tu m’arrêteras si je me trompe, toi qui un jour posa ton bicorne et ton épée de polytechnicien… Tu sembles nous dire ces mots simples mais forts : « Continuez à poursuivre l’œuvre que j’ai commencée ; conservez-en précieusement l’esprit ; pour vous j’ai tout donné. Et si mon épée s’est brisée, c’est à votre service… »